lundi 7 septembre 2015

Du domaine des Murmures, Carole Martinez

Une fois, j'ai failli lire Carole Martinez.
C'était le cœur cousu, je m'en souviens, j'avais encore l'innocence attendrissante de mes 27 ans.
J'ai manqué de temps et j'ai dû me résoudre à le rendre à la bibliothèque sans même l'avoir commencé.
Le genre d'opprobre qui marque, vous pouvez vous le figurer sans mal.
Du coup, quand la publication de son dernier roman, la terre qui penche, a été annoncée, j'y ai vu un signe du tout-puissant, une deuxième chance, l'invitation ultime à ne pas négliger.
Carole, en selle, j'arrive!



Le synopsis

Du domaine des Murmures est l'histoire d'Esclarmonde, une jeune fille qui, à 17 ans, brave son père et se coupe une oreille devant l'autel, en déclarant qu'elle refuse d'épouser Lothaire, la brute épaisse que son aimable de géniteur lui a dégoté, parce qu'elle s'est vouée à Dieu. A sa demande, son père fait ériger une cellule attenante à une chapelle, dans laquelle elle est emmurée. Bientôt, sa réputation enfle, et elle devient pour tous une sainte devant laquelle on se rend en pèlerinage. Car, en renonçant à la liberté, Esclarmonde découvre qu'elle a acquis une aura singulière.


Mon avis

Je ne peux pas vraiment dire que j'ai été surprise, ce que l'on dit de Carole Martinez est assez fidèle au ressenti que j'ai pu éprouver en lisant son roman.
Son écriture est poétique, raffinée, son univers est particulier mais ne manque pas de cohérence et de robustesse, on est en lisant véritablement plongé 800 ans plus tôt, l'expérience est insolite mais ne manque pas de charme.
Ayant personnellement peu d'attrait pour cette période de l'Histoire, j'aurais pu penser que je resterais insensible au récit, et ce n'a pas été le cas : le personnage d'Esclarmonde est d'une très grande finesse, recélant des paradoxes tout humains, et une force de caractère hors du commun. Difficile, partant, de ne pas partager ses joies comme ses affres.
Un roman d'une belle qualité littéraire!


Pour vous si...
  • Personne ne vous écoute jamais, et vous le déplorez. Coupez-vous une oreille comme Esclarmonde, ça devrait vous aider à grappiller quelques secondes d'attention
  • Vous vous délectez des métaphores qui impliquent Jésus, sans qu'il n'ait rien demandé
  • Vous adorez quand les mariages ne se passent pas comme prévu et que quelqu'un jette un froid en plein milieu de la cérémonie

Morceaux choisis

"J'étais belle, tu n'imagines pas, aussi belle qu'une fille peut l'être à quinze ans, si belle et si fine que mon père, ne se lassant pas de me contempler, ne parvenait pas à se décider à me céder à un autre."
(un problème que mon paternel n'a jamais expérimenté)

"Paroles de femme n'étaient alors que babillages. Désirs de femme, dangereux caprices à balayer d'un mot, d'un coup de verge."

"Quelle merveille pour l'emmurée que de s'imaginer sillonnant un si vaste univers!"

"Certes ton époque n'enferme plus si facilement les jeunes filles, mais ne te crois pas pour autant à l'abri de la folie des hommes. J'ai vu passer les siècles, l'histoire n'a jamais cessé de chambouler nos vies et les évidences sont infiniment fragiles."


Note finale
4/5

(très bon)

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire