mardi 5 avril 2016

Les vies multiples de Jeremiah Reynolds, Christian Garcin

C'est absolument fou, le pouvoir évocateur d'un titre.
En quelques mots, on se construit une image, une idée plus ou moins rocambolesque d'une intrigue entière, de l'ambition de l'auteur, de son style, du lien que l'on va pouvoir créer avec lui.
Christian Garcin a visiblement bien compris cela, si l'on se fie au titre de son dernier roman.
Les vies multiples de Jeremiah Reynolds. 
Je ne sais pas vous, mais moi, ça me propulse dans un univers quasi onirique, fait d'ubiquité, d'identités doubles, d'êtres aux mille destins. Le tout avec un arrière-goût d'Amérique profonde, puritaine, mythique aussi, sans doute. 
C'est un art subtil, que de choisir un titre.
Et dire qu'il y en a qui produisent des choses comme Ici ça va ou Look.
Comment diantre les prendre au sérieux?



Le synopsis

Le roman retrace le parcours fascinant de Jeremiah Reynolds, premier américain à être allé explorer le continent antarctique, devenu colonel pendant la guerre du Chili, instigateur de l'histoire qui inspira Moby Dick à Melville, et qui fut bien d'autres choses encore.

Mon avis

Je lisais, il y a peu, l'interview d'un éditeur, qui soulignait combien il est finalement rare de rencontrer une oeuvre où le style s'allie richement à une histoire, qu'il s'agit là d'une combinaison précieuse, qui n'est pas l'apanage de bien des manuscrits.

Les vies multiples de Jeremiah Reynolds est un bel exemple de roman qui parvient à réunir les deux : un style singulier, personnel, et une histoire prenante.

La langue est en effet vive, elle happe le lecteur, le rythme dans tout le roman est relativement soutenu, et il y a quelque chose de suranné, de joliment désuet dans les mots utilisés par Garcin, qui confère à l'ensemble une allure charmante.

L'histoire, ensuite : il est époustouflant d'imaginer que c'est bien la vie d'un homme qui est relatée là, tant elle regorge de facettes, de rebondissements, d'échos, et de diversité. Ne vous laissez pas aller à comparer votre quotidien avec l'évolution de Jeremiah : vous serez immanquablement envahi d'un sentiment de morosité, de modestie. La seule personne à laquelle je puisse penser et qui pourrait éventuellement être à la hauteur est Sydney Bristow, mon idole de toujours.

Deux excellents points donc, en faveur de ce récit au titre aguicheur.
Je n'ai cependant pas été absolument conquise par ce roman pourtant prometteur, du fait de la façon dont nous apparaît Jeremiah Reynolds en personne : de loin, finalement, et il m'a semblé difficile de le cerner, de comprendre les élans qui l'animaient, sa psychologie : ses actions sont rapportées en détail, mais je me serais plu à lire davantage sur son univers intérieur, sur son moteur, sur ses motivations.

La lecture est cependant plaisante, et fort instructive!

Pour vous si...
  • Vous êtes féru de romans d'aventures, où les aventures sont bien réelles
  • Vous êtes un adorateur d'Edgar Allan Poe ou de Herman Melville

Morceaux choisis

"Car la capacité de chacun à se raconter des histoires pour vivre mieux est prodigieuse."

"Il lui semblait que la vie de tous les hommes, si riche et variée fût-elle pour certains, si monotone semblât-elle à d'autres, n'était au bout du compte jamais très différente d'un individu à l'autre et se résumait à quelques images furtives : un ciel nuageux au-dessus de collines pelées, la silhouette d'un chat se faufilant dans la cabine d'un bateau, quelques pages jaunies que le vent faisait tourner sur un bureau d'acajou, un océan de glace, l'odeur de l'herbe fraîche des prairies de l'enfance, le froid piquant, la lumière dans les yeux d'un marin, le sillage d'une baleine, des applaudissements, un cri."


Note finale
2/5
(pas mal)

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