mercredi 13 avril 2016

Tsubaki, le poids des secrets, Aki Shimazaki

Un tout petit roman avec une grosse fleur sur sa couverture et un titre à la japonaise : voilà qui m'a attirée comme un dorayaki, ces gourmandises irrésistibles dont on ne déplore que la brièveté du plaisir qu'elles procurent!



Le synopsis

A la mort de sa mère Yukiko, Namiko reçoit une longue lettre que cette dernière a rédigé pour elle avant de mourir. Elle y fait une révélation terrible, qui l'entraîne à raconter à sa fille son histoire, une partie de son adolescence, jusqu'au bombardement de Nagasaki, où elle vivait avec ses parents, en 1945.


Mon avis

Le style du récit est tout à fait emblématique des romans japonais : une langue épurée, qui s'attache à décrire factuellement le quotidien, n'évoquant les sentiments et les émotions qu'avec pudeur et retenue, ce qui a pour effet paradoxal de décupler la force des passages qui s'y risquent.
En dépit de la brièveté du récit, l'histoire de Yukiko est dense et captivante : il y est question de trahison, de duplicité, d'amour, des carcans de la société japonaise à l'époque des années 1940, et des souffrances qui peuvent résulter de choix se conformant aux attentes familiales et sociales.

Au-delà de cette intrigue, le cadre choisi est tout à fait intéressant : le Japon de la Seconde Guerre Mondiale. Par le biais de ce récit, la parole est donnée au peuple qui sortira vaincu et brisé de la guerre, ravagé par les bombes atomiques visant à servir d'exemple et à dissuader toute volonté de poursuivre le combat.
Les scènes évoquant les conséquences immédiates du bombardement atomique sont terrifiantes ; en amont, on constate également les privations dont souffre le peuple auquel on impose d'être uni pour pouvoir être vainqueur, et les divergences d'opinion ramenées au silence, le souhait de nombreux japonais que la guerre en finisse, quitte à ce qu'elle signifie pour le Japon une défaite.
Ainsi, la lecture de Tsubaki a été bénéfique pour moi à cet égard, car si l'on peut lire à foison des romans portant sur la France, l'Allemagne, le UK ou les Etats-Unis pendant la Guerre de 1939-1945, il me semble que le Japon n'est guère au centre de la littérature consacrée à ce pan d'Histoire (il peut bien sûr aussi s'agir de lacunes culturelles de ma part).

En refermant le livre, j'ai réalisé combien il m'avait impressionnée, sous ses faux airs de simplicité et de modestie.
Je vais donc très vite m'atteler à la suite de la série, car oui, il y a toute une flopée de petits livres qui suivent Tsubaki, et je suis impatiente de les dévorer découvrir.


Pour vous si...
  • Vous êtes un inconditionnels des romans japonais, ou simplement un curieux à la recherche d'une bonne entrée en matière

Morceaux choisis

"Je voyais des boutons de camélias, bien tenus par les calices. C'étaient les camélias qui fleurissent en hiver. Dans la campagne près de Tokyo, quand il neigeait, je trouvais les fleurs dans le bois de bambous. Le blanc de la neige, le vert des feuilles de bambous et le rouge des camélias. C'était une beauté sereine et solitaire."

"Le 15 août, après ces deux bombes atomiques, l'empereur Hirohito déclara la défaite du Japon à la radio. Je ne comprenais pas ce qu'il disait : sa voix n'était pas claire. Je croyais qu'il nous ordonnait de faire gyokusaï. On se mit à pleurer devant la radio en répétant : "La guerre est finie!" Pourtant, ce que je ressentais à ces mots, ce n'tait pas le soulagement ni la joie, mais c'était le regret de ne pouvoir nous battre jusqu'à la mort.
Pour moi, c'était le début de ma guerre. J'avais manqué l'occasion de mourir pour le crime que j'avais commis."


Note finale
4/5
(excellent)

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