mardi 31 mai 2016

Le clan des femmes, Hemley Boom

Voilà un auteur plébiscité par Nombre Premier, et que je ne pouvais décemment pas négliger plus longtemps : Hemley Boom. La lecture, c'est avant tout beaucoup de bouche-à-oreilles, de recommandations émanant de gens de confiance, ou, le cas échéant, un bon moyen de tester le potentiel d'une amitié (comment rester neutre, voire optimiste, face à une suggestion de lire Sophie Kinsella ou Katherine Pancol ? Tout est question de compatibilité). 
Avec Nombre Premier, l'évidence est sans cesse renouvelée, si bien que je n'avais pas le moindre doute sur la qualité du livre avant même que d'en lire les premiers mots.



Le synopsis

Le clan des femmes nous raconte Sarah, la grand-mère de l'auteur, mariée alors qu'elle n'a qu'une dizaine d'année à un vieil homme qui a déjà une quinzaine d'épouses. Première épouse, la plus ancienne, la prend sous son aile et elle grandit auprès d'elle, jusqu'à la mort du Vieux.
Le décès donne lieu au partage de l'héritage, des femmes et des parcelles, entre les fils du défunt. Sarah est choisie par Fils Aîné, mais le retour au village du fils prodigue, l'enfant de Première épouse parti voyager au loin, bouleverse la vie de Sarah.

Mon avis

Le clan des femmes est un prodige de simplicité et de fulgurance.

Simplicité d'abord, parce que la langue est épurée, elle ne s'embarrasse pas d'un style ampoulé et va droit au but, elle a la franchise de l'oralité et possède l'art du conte, car l'histoire de Sarah nous aspire, nous envoûte dès les premiers instants.

Fulgurance ensuite, parce qu'il recèle des vérités qui font grandir, des enseignements que Sarah partage avec sa petite-fille et, partant, avec nous lecteurs, de ces vérités qui surgissent à l'occasion d'événements quotidiens qui forment pourtant la substance de notre condition : sur la place des femmes, sur le rôle de mère qui octroie à chacune une place dans la société à laquelle elle ne peut accéder sinon, sur ce qui entrave le cycle naturel des étapes de l'existence, par exemple lorsqu'un enfant ne naît pas d'une union, et que cette absence en vient à empoisonner le couple amoureux.

Le cadre du récit est dépaysant, et nous invite à découvrir une culture et des mœurs éloignés en laissant de côté les éventuels préjugés que l'on pourrait nourrir à leur encontre : dans le clan de Sarah, la polygamie est tradition, les hommes décident du sort des femmes qui s'apparentent bien souvent à des enfants dont ils ont la charge, pourtant, au-delà de cette approche très patriarcale, les femmes sont celles qui font tenir le foyer debout, celles dont dépendent l'harmonie et la pérennité du clan, et elles peuvent susciter le respect et la crainte, car on leur prête souvent des pouvoirs ensorcelants.

J'ai été conquise par ce premier roman intime et touchant, relativement court, puisqu'il ne compte que 130 pages, mais qui m'a fait voyager et réfléchir, a nourri en somme une ouverture d'esprit.
Ne le manquez pas!


Pour vous si...
  • Vous appréciez un livre qui vous parle d'un environnement, d'une culture qui ne sont pas les vôtres, et qui vous poussent à questionner le relatif et l'absolu
  • Vous êtes convaincu qu'un bon roman doit avoir au moins un personnage pygmée

Morceaux choisis

"Les femmes étaient l'héritage, pas des héritières."

"Il y a des moments dans la vie où tout est parfait, me dira Sarah des années plus tard, la lune éclaire la nuit et on y voit presque comme en plein jour, des milliers d'étoiles illuminent le ciel, le vent bruisse dans les arbres, et devant le monde entier, un homme vous choisit vous, entre toutes."

"Dans les sociétés traditionnelles, a fortiori polygames, une femme sans enfants était considérée comme peu de chose. Elle a failli par rapport à son mari, dont elle ne perpétuera pas le nom, elle a failli par rapport à sa propre famille en leur faisant honte, elle n'était rien aux yeux des autres femmes. Elle pouvait travailler comme quatre, aider la société autant qu'elle le voulait, sans enfants, elle n'était qu'une moitié de personne, quelqu'un qui n'avait pas rempli sa part de contrat en quelque sorte."

"La maternité n'est pas une évidence, même les animaux laissent mourir de faim leurs enfants les plus fragiles. Un enfant ne fera pas de toi une personne plus belle, plus heureuse. Un enfant ne remplira pas le vide, ne te guérira pas de ta propre enfance. Pas plus qu'un homme, même s'il t'aime de tout son cœur. Tu ne peux pas mettre tous tes espoirs dans un enfant, ce ne serait pas juste. Personne ne devrait avoir à être un médicament pour une autre personne, me disait-elle sans cesse."


Note finale
5/5
(coup de coeur)

2 commentaires:

  1. <3 Trop contente qu'il t'ait plu! Si d'aimer est mon grand coup de coeur, j'ai hâte que tu le lises!

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  2. Dans ce cas, je ne vais pas manquer de me le procurer!! :)

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