mercredi 10 août 2016

Le tumulte des flots, Yukio Mishima

Mishima a été rappelé à mon bon souvenir il y a quelques semaines.
J'avais été bousculée par La musique, séduite par la folie qui couvait dans Le pavillon d'or.
Mishima est un écrivain grandiose, au sort aussi romanesque que son oeuvre. 
Voici mon ressenti suite à la lecture du Tumulte des flots.


Le synopsis

Sur une petite île japonaise, Utajima, les 1400 habitants vivent de la pêche, et la moindre intrigue est rapidement connue de tous.
Ainsi, lorsqu'une idylle se noue entre Hatsue, fille du riche Terukichi, et Shinji, simple pêcheur, le secret s'ébruite bientôt, et le père de Hatsue interdit aux deux amants de se revoir. Il envisage de donner la main de sa fille à Yasuo, un jeune homme arrogant et paresseux.
Bientôt, Yasuo et Shinji sont tous deux enrôlés dans l'équipage d'un même bateau. 

Mon avis

Le tumulte des flots est un roman qui pourrait s'apparenter à un roman initiatique.
Il y est question d'amour et de valeurs, et il transmet des enseignements riches sur ces sujets.

Deux jeunes gens s'aiment, d'un amour que l'on pourrait qualifier de pur. A cet amour s'opposent la condition de Shinji, qui fait de lui un piètre candidat pour demander la main de Hatsue, ainsi que l'intérêt que portent à Hatsue d'autres garçons, dont Yasuo, lesquels n'ignorent pas l'héritage qu'elle recevra, et qui briguent la fortune plus qu'ils n'aiment la jeune fille.

Les commérages aidant, Hatsue et Shinji sont éloignés, et leurs états d'âme sont rapportés par l'auteur, qui décrit la tristesse, la distance douloureuse, l'impuissance aussi, car leurs tentatives de se retrouver échouent.

Les personnages qui gravitent autour de Hatsue et Shinji apportent de la densité au récit, en juxtaposant leurs propres préoccupations, curiosité, jalousie, émotions.
Chiyoko, la jeune fille désabusée et complexée, introduit dans l'intrigue un grain de sable capital ; la mère de Shinji, croyant bien faire, va exciter la colère du père de Hatsue, Yasuo fait grandir la rumeur et éloigne les amants, Jukichi épaule Shinji et l'aidera dans la voie de l'accomplissement.

La trame est simple, au premier abord, mais elle est l'occasion pour Mishima de véhiculer certaines valeurs fondamentales : l'énergie, bien sûr, qui sera décisive dans l'issue finale, associée au travail, à la persévérance, à l'effort. A l'opposé de Yasuo, Shinji ne ménage pas sa peine, il est fort et fiable.
Le courage est aussi ce qui distingue les êtres, et c'est aussi ce qui caractérise Shinji lors de la prouesse réalisée en mer.
La probité l'oppose au roué Yasuo, qui ambitionne de violer Hatsue pour la forcer à l'épouser.
Shinji a la noblesse de cœur, alors même qu'il vit dans l'indigence.

En marge de l'intrigue qui se déroule à Utajima, il y a la nature environnante, qui est un personnage à part entière, Mishima lui dédiant de magnifiques passages. Le tumulte des flots, invoqué à de nombreuses reprises, n'est pas sans évoquer le tumulte intérieur à Shinji et Hatsue, la passion qui les habite, alors que les apparences dictent l'impassibilité, la tempérance.

En comparaison avec les précédents romans que j'avais lus de Mishima, j'ai trouvé dans Le tumulte des flots une prose plus simple, plus épurée. La poésie s'y exprime plus librement, notamment au travers de la nature comme évoqué plus haut, les phrases m'ont paru courtes, ce qui rend la lecture douce. Cette écriture sert l'intrigue admirablement, et permet de représenter des scènes très visuelles, et, de ce fait, prégnantes.

Le roman me donne envie de repartir en exploration, et de découvrir davantage de Mishima, qui m'a donné à voir plusieurs visages, nourrissant ma curiosité et mon intérêt.


Pour vous si...
  • Vous n'avez pas besoin d'une intrigue alambiquée pour vous laisser séduire
  • Vous souhaiteriez vous essayer à Mishima

Morceaux choisis

"Ses yeux noirs étaient clairs mais cette clarté n'était pas celle d'un intellectuel ; c'était le don de la mer à ceux qui vivent d'elle."

"Comme il manquait d'imagination il ne connaissait pas l'art efficace de tuer le temps grâce à une imagination qui grossit et complique les sentiments d'inquiétude ou de joie."

"Ce qui compte dans l'homme c'est l'énergie. Il faut qu'un homme ait de l'énergie."


Note finale
4/5
(excellent)

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